Le triomphe de Jésus et de l'Église Catholique

La nouvelle tomba sur le monde par le biais des médias ; journaux, télévision, radio, internet : on avait désormais la preuve incontestable de l’existence de Dieu. Où que l’on se trouvât sur terre, l’on vit des myriades d’anges descendant du ciel en chantant des cantiques en latin, puis la Vierge Marie portant l’Enfant Jésus qui bénissait les foules. Les apparitions duraient une heure ou deux, puis elles recommençaient plus tard, aussi bien le jour que la nuit.
Elles survenaient partout sans exception ; dans les pays catholiques comme la France, l’Espagne, l’Italie ou l’Amérique Latine, mais aussi dans les pays protestants comme les États Unis, l’Angleterre, la Scandinavie ou l’Allemagne.
Et plus surprenant, dans les pays non chrétiens ; en Israël, au Mur des Lamentations, en Arabie Saoudite, au cœur de La Mecque dans la berceau de l’Islam, la Vierge Marie et l’Enfant Jésus se manifestèrent en plein pélerinage. Dans un arabe littéraire parfait, les pélerins entendirent une voix céleste leur intimer l’ordre d’abandonner leur fausse religion et de rejoindre la Sainte Église Catholique Romaine et Apostolique.
Il en fut de même en Inde, au dessus du Gange où se baignaient les pénitents Hindouistes, ainsi qu’en Asie, en Chine, au Japon chez les Bouddhistes et les Shintoïstes, en Afrique chez les Animistes, enfin bref, partout.
Les membres de l’ONU convoquèrent une assemblée extraordinaire. Extraordinaire dans le sens où jamais cette institution n’eut à discuter d’un tel sujet. On s’était plus ou moins préparé à l’idée d’accueillir des extra-terrestres, par exemple, ce qui aurait semblé banal à côté de çà.
Après des heures de débat houleux et passionné, un communiqué annonça que les membres de l’Organisation des Nations Unies reconnaissaient officiellement l’existence de Dieu, que la seule vraie religion était celle de l’Église Catholique Romaine et Apostolique et que toutes les autres religions étaient dans l’erreur.
Des millions et des millions d’hérétiques s’empressèrent de rejoindre l’Église Catholique, la seule, la vraie, en dehors de laquelle il n'est point de salut. On se bousculait à l’entrée des chapelles et des cathédrales pour se faire baptiser et même si toutes les synagogues, mosquées et autres temples avaient été reconvertis en églises, il n’y avait pas assez de prêtres pour baptiser tout ce monde. On dut déléguer une partie de la tâche à des diacres, des oblats et aussi à de simples fidèles de bonne moralité pour accomplir le travail.
Bientôt, la quasi-totalité du genre humain fut convertie au Catholicisme, à l’exception des églises orientales comme les Orthodoxes, les Coptes, les Maronites, les Syriaques etc. qui n'en avaient pas besoin, du fait qu'elles reconnaissaient l'autorité du Pape, elles faisaient donc, selon le Droit Canon, pleinement partie de l'Église Catholique, au même titre que l'Église latine.
Il restait quelques irréductibles, qui s’accrochaient encore à leur ancienne religion mensongère, ou des athées qui avaient, envers et contre tout, décidé de le rester.
Ces derniers tentaient de donner une explication rationnelle à tout cela ; ils parlaient d’hallucinations collectives, bien que les apparitions pouvaient être filmées. Et tout le monde sait que l’on ne peut filmer une hallucination. Ils parlaient de réverbération sur les couches atmosphériques, d’anthélies etc. Mais personne ne les écoutait, tout le monde avait les yeux levés au ciel dans une attitude d’extase.
Bientôt, ces derniers réfractaires durent ployer le genou devant l’évidence, car ce fut Notre Seigneur Jésus Christ lui-même qui descendit du ciel dans toute Sa gloire devant les caméras du monde entier. Après s’être manifesté au dessus de tous les pays, il vint se poser sur la place du Vatican, auréolé de lumière, accompagné d’angelots qui chantaient ses louanges.
Le pape en personne accourut pour se jeter à Ses pieds, il baisa le bord de Sa tunique et fut aussitôt transfiguré.
Ensuite, Jésus vola jusqu'au balcon de la Basilique Saint Pierre  d'où il s'adressa à la foule, son discours fut retransmis dans le monde entier, il s’agissait du sermon sur la montagne, que chacun entendit dans sa propre langue.
Puis il annonça qu’il inaugurait dès ce jour un règne de mille ans. Mille ans de paix et de sérénité avant que Satan ne soit relâché et que commence le Jugement Dernier.
Désormais, le Fils de Dieu régnait en personne sur la terre entière, il n’y avait plus aucun crime ni délit, tout le monde se comportait bien. On n’avait pas le choix, puisqu’au moindre écart de conduite, au mieux le ciel s’assombrissait et une voix terrible accusait le coupable en public, alors celui-ci devait se flageller en récitant des « Notre Père » et des « Je vous salue Marie » durant une période variable. Au pire, le contrevenant était foudroyé sur place par un éclair de colère divine. Ce qui, évidemment, produisait un effet dissuasif efficace.
Seulement, beaucoup ne pouvaient s’empêcher de soupirer en pensant : « et dire qu’on en a pour mille ans comme çà ! » Car en plus, on était devenu immortel. Et comme le suicide était un grave péché, on préférait prendre son mal en patience plutôt que de terminer dans le Lac de Feu, ce qui aurait été pire. De deux maux, il faut choisir le moindre.