La merveilleuse cité de Zarahemla avait pris feu, celle de Moroni avait été engloutie dans la mer, et plusieurs autres villes avaient été ravagées par des cataclysmes tels que des tremblements de terre, des volcans ou des glissements de terrain. En plus, une épaisse fumée était montée de la terre, qui masqua le soleil trois jours durant.
Puis, peu à peu, les catastrophes s’espacèrent, la violence des séismes diminua, et progressivement, la fumée qui obscurcissait le jour se dissipa. Lorsque les choses furent revenues à la normale, l’on se mit à enterrer les morts, déblayer les débris et reconstruire ce qui avait été détruit.
Quelques semaines plus tard, l’annonce d’un nouvel évènement fit le tour du pays ; dans un village côtier, on avait retrouvé un étranger sans connaissance qui avait été rejeté par la mer sur la plage. Il était vêtu de haillons, dont il était impossible de déterminer l’origine, sa peau était plus claire que celle des Néphites et des Lamanites, il avait de longs cheveux et une barbe noirs, et il avait d’étranges marques, sur les mains et sur les pieds comme s’ils avaient été transpercés par des clous, ainsi qu’une grande cicatrice sur le ventre.
L’étranger était resté inconscient trois jours durant, puis il s’était réveillé à l’aube du quatrième jour. Les gens étaient venus de tout le village et des alentours pour le voir. Son arrivée avait coïncidé avec les cataclysmes qui avaient détruit la moitié du pays, on supposait qu’il avait sûrement quelque chose à voir avec eux, dans ce cas, il s'agissait sans doute d'un dieu ou d'un envoyé des dieux, et il valait mieux le traiter correctement.
Les gens qui l’avaient accueilli, avec du temps et de la patience, arrivèrent à communiquer avec lui et lui apprendre des bribes leur langue. Ce que l'étranger put expliquer ne leur apprit pas grand chose, si ce n'était son nom : Yeshua. En montrant le large, il faisait comprendre qu'il venait de très loin, de l'autre côté de l'océan, que son bateau avait fait naufrage près des côtes et qu'il était le seul survivant.
C'était tout ce qu'on avait pu tirer de lui durant toutes les années où il resta parmi les Néphites, quand on lui demandait d'en dire plus, il entamait de longs discours dans sa langue natale sans qu'on puisse le faire taire.
On l'avait amené à Zarahemla devant le Roi, celui-ci l'interrogea lui-même mais il ne put en apprendre plus que les villageois. Il fit alors appel aux prêtres, qui étaient les hommes les plus érudits parmi les Néphites et connaissaient nombres de langues. Ils écoutèrent Yeshua parler pendant plusieurs heures, mais ils ne comprirent pas un mot de ce qu'il disait. La langue qu'il parlait ne ressemblait à aucun dialecte Néphite ou Lamanite connu.
Les Lamanites étaient le peuple ennemi des Néphites, ils vivaient au sud du pays.
Comme il ne ressemblait ni à un Néphite ni à un Lamanite, les prêtres de Zarahemla conclurent que Yeshua était un descendant lointain des Jarédites, les premiers habitants de ce pays qui avaient disparu depuis des siècles.
L'étranger semblait inoffensif, le Roi décida donc de le laisser en paix et l'autorisa à vivre au pays de Zarahemla.
Yeshua s'installa comme charpentier dans le village côtier où il avait été recueilli. Au fil du temps, il finit par apprendre la langue des Néphites, mais il ne révéla pas grand-chose sur lui-même ni sur l'endroit d'où il venait.
Il disait que dans son pays, les gens vivaient un peu comme les Néphites. Il était en voyage d'affaire quand son bateau avait été pris dans une tempête et avait dérivé jusqu'ici avant de couler.
Quand on lui demandait comment il s'était fait ces blessures aux mains, aux pieds et au ventre, il prétendait qu'il s'agissait d'accidents de travail, ce qui semblait peu crédible, car elles ne ressemblaient guère aux blessures que se font habituellement les charpentiers.
Quoi qu'il en fut, on ne put jamais apprendre rien de plus sur lui. Néanmoins, il acquit rapidement une certaine renommée dans toute la région, car il était habile de ses mains et savait construire des embarcations robustes pour les pêcheurs.
D'ailleurs, il construisit pour lui-même un bateau plus grand que les autres sur lequel il travailla plusieurs années. Quand il l'eut terminé, il le mit à flot, et avant d'embarquer dit quelques mots aux villageois réunis sur le quai. Il leur annonça qu'il retournait chez lui, ou du moins, qu'il allait essayer, car les siens lui manquaient, puis il les remercia de l'avoir si gentiment accueilli chez eux durant tout ce temps et promit de ne jamais les oublier.
Il y en eut trois qui voulurent l'accompagner, alors Yeshua les convia à monter à bord avec lui. Puis ils hissèrent la voile et s'éloignèrent lentement vers l'est, de l'autre côté de l'océan...
Sur le pont, Yeshua adressa un dernier signe d'adieu aux Néphites avant de disparaitre à l'horizon.